Société d’histoire et de généalogie des Hautes-Laurentides
Rue Frontenac 4e partie (1948-1952) (5/8)
Claude Daoust
Le temps de l’insouciance achève.
1951. J’ai 11 ans, Clarisse 9 ans, Lise 6 ans, Robert 2 ans, papa 42 ans et maman 37 ans. Papa creuse des puits dans l’Outaouais. Maman est enceinte et les paris sont ouverts, moi c’est un petit frère, Clarisse et Lise une petite sœur. Le 7 mai au soir maman nous envoie chez nos voisins les Moreau pour la nuit. Notre grand-mère Chalifoux reste avec elle à la maison. C’est le docteur Lemieux qui est censé venir pour l’accouchement. À notre retour à la maison le lendemain matin maman n’est plus là, grand-mère nous apprend qu’elle est à l’hôpital. Entretemps quelqu’un est parvenu à joindre papa, il arrive vers 10h30, grand-maman ne lui dit qu’une phrase: « ELLE EST CHEZ OUELLETTE », j’ai compris, je sais ce que signifient ces mots, ça veut dire MORTE, soudain j’ai mal au ventre. Je suis tombé dans une sorte d’état second. Je me rappelle l’exposition au salon funéraire Achille Ouellette, l’afflux des visiteurs, et parmi eux mes camarades de classe. Une pluie fine tombait le 10 mai au matin alors que nous suivions le corbillard du salon à l’église, puis jusqu’au cimetière pour l’enterrement. Ce sont des moments chargés d’émotions, mais à 11 ans on est un peu inconscient et on ne vit que l’instant présent, on ne pense pas à l’avenir. C’est seulement plus tard que je prendrai la mesure de cette perte.
Notre nouveau petit frère, baptisé André, est adopté par tante Thérèse et oncle Cléophas qui seront bien bons pour lui. Après une période d’instabilité à la maison, la vie va pouvoir reprendre comme avant ou presque grâce à notre grand-mère Chalifoux qui vient s’y installer. Elle avait toujours été très proche de sa fille et de ses petits-enfants, nous l’aimions beaucoup. J’entreprends ma 7e année à l’école Saint-Eugène. Mais la tâche d’élever quatre enfants était lourde pour une femme âgée au cœur malade. Au printemps de 1952, après une « crise de cœur », elle s’en retourne chez elle à Sainte-Anne. On devra quitter notre maison vers le mois de mai, chacun avec une grosse malle. Nous finirons l’année scolaire pensionnaires, mes sœurs à l’École normale, Robert et moi chez des demoiselles qui tiennent une maison de pension dans un autre quartier de la ville. Avec le recul je crois que c’est dans ce court laps de temps que je suis passé de l’état d’enfant à celui d’adulte. L’ambiance y était très rigide. En dehors des repas, pris en silence, j’étais confiné avec Robert dans notre chambre. J’avais en plus de grosses gales sur le corps mais aucune dans le visage de sorte que personne ne s’est aperçu que j’avais attrapé la varicelle (j’en ai reconnu les images sur internet). Le plus désolant je ne voyais plus mes amis.
Condensé d’extraits du livre Sara Labelle (1888-1962) et Ambroise Chalifoux (1877-1918): De Brébeuf à Sainte-Anne-du-Lac, Lise Daoust, 2019. Annexe: Souvenirs de Claude.
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