Être prête en 2021, ça veut dire quoi?
L’abbé Jean-François Roy a été nommé curé du grand secteur de Mont-Laurier, le 1er juillet dernier. À 36 ans, il a maintenant la plus grande charge pastorale du diocèse, avec un territoire comprenant la Paroisse Notre-Dame-de-l’Alliance (Cathédrale de Mont-Laurier), la Paroisse Notre-Dame-de-l’Espérance et la Paroisse Bon-Pasteur pour une population d’environ 22 500 personnes. Mais qu’est-ce que c’est que d’être prête en 2021? L’info en a discuté avec lui.
Qu’est-ce que ça change pour vous d’avoir été nommé curé?
La tâche s’agrandit, mais le salaire ne change pas (rire). C’est plus une marque de confiance qu’une promotion. Ça apporte plus de responsabilités. Certaines personnes croient que parce que plusieurs églises ferment, il y a moins de travail, mais il n’y a pas moins de funérailles, de baptêmes ou de mariages. Les gens célèbrent ça ailleurs. Souvent, les célébrations se font à Mont-Laurier et après on se déplace dans les municipalités pour se rendre soit au cimetière, soit dans des salles. Je me déplace. (…) Comme je me retrouve le seul prêtre à couvrir tout le territoire et que je n’ai ni vicaires ni abbé, la tâche est grande.
Expliquez-nous ce que vous faites de vos journées.
Tous les matins, il y a la messe de 9h. J’arrive plus tôt pour prendre mes courriels et voir s’il n’y a pas quelque chose de majeur. Après la messe, c’est souvent des rencontres avec des familles pour les funérailles à venir et qui se font souvent le samedi. Parfois, il y a d’autres activités pastorales qui se tiennent aussi le samedi. Les week-ends sont souvent très occupés. Les samedis d’été, il y a aussi les mariages et les dimanches, avec la messe ou à part, il y a les baptêmes. (…) Chaque célébration demande temps et préparation. Il faut aussi penser aux déplacements quand les événements se passent dans d’autres villages. (…) En devenant prêtre, je me suis toujours dit que je prendrais un soin particulier pour ce qui est de l’accompagnement des proches. J’essaie d’avoir une approche naturelle, moderne et d’être près des gens dans ce qu’ils vivent. Je n’ai pas peur de leur dire que moi-même, parfois, il y a des choses que je ne comprends pas. Il y a aussi les conseils d’administration, car nous sommes un OBNL, un organisme de charité et on a des biens administratifs à gérer et c’est mené par les marguillers, mais j’y assiste. (…) Il y a des gens qui demandent une rencontre parce qu’ils ont besoin d’une oreille ou de conseils. Pour ça aussi, il faut se rendre disponible. Il y a aussi l’onction des malades que je dois aller faire à l’hôpital et ça ne s’organise pas à l’avance. (…) Il y a la formation chrétienne des enfants, qui ne se fait plus à l’école, ainsi que celle de jeunes adultes de plus en plus nombreux. Je ne suis pas seul là-dedans, mais ça prend de la planification. Je passe plusieurs choses, mais ça donne une bonne idée de mon horaire.
Que pensez-vous du déclin de l’Église, du fait que les gens y viennent moins?
C’est vrai que les gens se sont un peu éloignés de l’Église. C’est correct, c’est peut-être moins dans leurs priorités que ce l’était pour nos parents ou grands-parents. La façon de présenter l’Église, à travers le temps, a aussi beaucoup changé et la perception de la religion a suivi. Par exemple, avant, les gens allaient voir leur curé pour des questions d’achat de propriétés ou pour des conseils moraux, maintenant ils se tournent vers des professionnels. Cette évolution a apporté des changements dans les façons de faire et je crois qu’il faut s’adapter. Il y a encore de la vie. Pas comme il y a 50 ans, mais il y a encore quelque chose et on répond encore à des besoins.
Pourquoi, à notre époque, on décide d’entrer en religion?
Je vais commencer par la réponse classique: c’est l’appel Dieu, la vocation. C’est surtout le désir de servir, d’être près des gens et de les accompagner. C’est de ne pas vouloir être payé 100$ de l’heure comme psychologue, mais d’être capable d’apporter du soutien aux gens et de leur faire du bien. C’est sûr que (…) j’ai parfois des questionnements. J’ai l’âge où mes amis fondent des familles, ont des vies de couple, choses auxquelles j’ai accepté de renoncer. L’église est vieillissante, moi, j’arrive avec une énergie plus jeune, avec des projets et des choses que je voudrais faire et parfois ça fait peur. C’est lorsque je réussis à accomplir ces choses que j’ai l’impression de m’accomplir, car ma façon de procréer est d’avoir des projets et d’essayer de les faire grandir. Si on m’empêche de faire ça, c’est là que je vais mourir. J’ai 36 ans! Oui, il y a des renoncements, mais il y a aussi de grandes joies dans le ministère. Je pense que ce qui est le plus difficile, c’est le questionnement des gens à notre égard et avec tout ce qu’on vit actuellement, la suspicion des gens. Au niveau des enfants, j’essaie d’avoir le moins possible de contacts avec eux pour éviter que les gens pensent que… Malheureusement, la société a tendance à tout mettre dans le même sac.
Que pensez-vous du sujet chaud des pensionnats autochtones et la découverte de tombes?
On paie pour les erreurs qui ont été faites dans le passé. Je suis un féru d’histoire et j’ai toujours eu le principe de ne jamais lire le passé avec nos yeux d’aujourd’hui. Il faut toujours remettre les choses dans leur contexte avec la mentalité du temps. Oui, on peut le critiquer, mais pas le juger avec notre perception d’aujourd’hui. Il y a eu des abus, c’est vrai. Il y a eu plusieurs choses qui n’étaient pas correctes, mais à travers tout ça, il y a aussi eu de saints hommes et de saintes femmes qui se sont donnés et qui ont essayé de faire de leur mieux. Ce n’est pas l’Église qui a décidé de faire ça, ce génocide-là. C’est le gouvernement qui est allé chercher du cheap labour en allant auprès des communautés religieuses pour faire le travail. (…) Oui, il y a des agissements qui doivent être dénoncés, mais je crois que ça rebondit plus fort parce que ça implique des institutions dites morales. Critiquer l’Église, aujourd’hui, ça fait partie de la vie courante, mais je crois que les gens, dans la population en générale, sont capables de faire la part des choses. (…) Des tombes anonymes ce n’est pas des charniers non plus. Là où c’est plus délicat, c’est que les familles n’ont pas été avisées de tout ça. Je ne veux pas défendre ce qui a été fait. Même si c’était une demande du gouvernement, est-ce que l’Église devrait s’excuser? Oui, elle devrait le faire. On doit prêcher par l’exemple, mais ça va dans les deux sens. S’il y a excuses, il faut recevoir un pardon.
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