Société d’histoire et de généalogie des Hautes-Laurentides
La colonisation des Laurentides (2/2)
Par David Saint-Germain. L’œuvre d’Arthur Buies mérite quelques instants de réflexion. Écrivain de renom, il a su présenter l’œuvre du curé Labelle avec une écriture qui a probablement inspiré plusieurs colons à tenter leur chance vers le Nord.
Arthur Buies présente le Nord comme une entreprise fondamentale pour la survie de la nation : « Oui, l’immense et superbe Nord, espoir, grandeur, force et gloire future de notre patrie n’apparaissait encore en ces temps-là qu’à travers un immense voile de brouillard… »
Ce court extrait s’inscrit bien dans le courant de pensée qui a construit un véritable mythe à propos du Nord. Inspiré des écrits de Rameau de Saint-Pierre, un prêtre français, le Nord est présenté comme la voie de salut et d’expansion pour le peuple canadien-français. Il présente le Nord comme un territoire incroyablement riche, en attente d’être utilisé à son plein potentiel : « Ces régions sont trop vastes, trop puissamment constituées et édifiées pour ne porter que des embryons de colonisation; elles ont l’air d’attendre impatiemment que des millions d’hommes s’abattent sur elles, les secouent de leur léthargie et les entraînent vigoureusement dans l’exercice libre de leurs forces et de leur fécondité ».
Bien sûr, Arthur Buies exagère, beaucoup même. Il prête une richesse démesurée au territoire qui pourrait devenir, apparemment, des centres de peuplement importants. Il écrit comme si le territoire ne devait pas être laissé à l’état sauvage. Il donne aussi un rôle important à l’homme pour faire ressortir la richesse de la nature comme si la nature non exploitée par l’humain était inerte. Cette notion du progrès s’inscrit dans la pensée chrétienne : la domination de l’homme sur la nature.
Toujours en accord avec les dogmes de son époque, Buies donne un rôle important à la religion. Véritable guide du mouvement, elle serait essentielle pour le bon déroulement de la colonisation : « Mais le Canadien n’est colonisateur, dans le sens pratique du terme, qu’à une condition, c’est que la colonisation marche avec la religion. De là le double rôle du clergé dans ce pays : conduire les âmes au ciel et les défricheurs à l’entrée des forêts vierges ».
Cet extrait présente aussi un préjugé bien tenace de la part des habitants de souches européennes : le Nord est vierge. Ces territoires sont pourtant occupés par des populations autochtones depuis quelques millénaires mais il s’agissait de populations nomades qui ont peu laissé de traces visibles de leur passage.
On apprend quelques lignes plus loin dans le même ouvrage que le curé Labelle considérait que construire une chapelle et installer un prêtre était aussi important que d’établir les voies de communication.
Ces extraits sont révélateurs du contexte dans lequel la colonisation des Hautes-Laurentides a été effectuée. Un territoire présenté comme providentiel, riche, supposément inhabité et dont la colonisation est nécessaire à la survie de la race.
Ce discours colonisateur sur fond de catholicisme a été repris par le gouvernement du Québec. Hormidas Magnan est l’auteur de Monographies paroissiales; esquisses des paroisses de colonisation de la province de Québec, publiée par le département de Colonisation en 1913. Cet ouvrage présente des paroisses de colonisation et leurs besoins. Dès la première phrase de la préface, le ton est donné : « L’œuvre si utile et si patriotique que poursuit le Département de la Colonisation, soit qu’il bâtisse des ponts ou qu’il ouvre de nouvelles régions en y faisant des routes et des chemins, à la religion. Véritable guide du mouvement, elle serait essentielle pour le bon déroulement de la colonisation »; la colonisation demeure une œuvre très valorisée, afin de faire croître la province, et qui demeure centrée sur la religion catholique.
C’est donc dans ce contexte que des hommes, des femmes et des enfants courageux ont tenté leur chance dans les cantons du Nord et peuplé un territoire qui, dans les faits, fut beaucoup moins accueillant que ce qu’on en disait dans les écrits de la propagande colonisatrice.
Cet article a d’abord paru dans la revue d’histoire La Laurentie, no. 14, 2012.
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