Alors que les deux premières sœurs arrivent en 1887
Les dernières Sœurs de Sainte-Croix quittent Nominingue
Laurette Desjardins et Reine Perreault, les dernières Sœurs de Sainte-Croix dans la région, ont quitté la paroisse de Nominingue il y a quelques jours. C’est un triste départ pour beaucoup. Arrivées en 1887 pour éduquer les premiers habitants de Nominingue, les sœurs seront de toutes les activités jusqu’à tout récemment. Aucun ne doute qu’elles ont rempli fièrement leur mission.
Dans la cuisine de leur maison, elles accueillent L’info accompagné des deux fondateurs des Gardiens du patrimoine archéologique des Hautes-Laurentides, Sylvie Constantin et Sylvain Généreux. Laurette Desjardins se voit plus chétive qu’il y a quelques années tandis que Reine Perreault, malgré son âge, respire la santé. Alors pourquoi ce départ?
« La raison première, c’est que tous nos terrains, notre campus de la Congrégation à Montréal sont vendus au Centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys. Nous sommes maintenant locataires. On a bâti une résidence l’an dernier et les nouveaux propriétaires voulaient savoir combien de chambres ils devaient bâtir. Comme on vieillit, nous nous sommes dit que nous allions nous rapprocher du cœur de notre communauté », explique Reine Perreault.
Laurette Desjardins ajoute: « Pour ma famille, j’ai toujours été loin. Maintenant, elle est contente que je me rapproche. Peut-être aussi que la santé nous a demandé de passer à autre chose? »
Elles ne seront pas seules dans la nouvelle résidence, car 175 personnes y trouveront place. Reine Perreault aurait bien aimé rester à Nominingue, mais sans Laurette, la petite maison est bien grande. Logées au 6e étage dans deux chambres côte à côte en ville, elles ne souhaitent que voir au moins la cime des arbres, car elles n’ont pas visité leur chambre, COVID oblige.
Que laissent les sœurs?
Sylvie Constantin souligne l’importance des sœurs dans la communauté depuis le premier jour. Reine Perreault remarque que ce sont des deuils qu’elles vivent à l’aube de leur départ. « Il y a ce deuil de laisser les gens bien sûr, mais aussi la nature. J’aime marcher ici, car souvent je ne rencontre personne et j’ai le plaisir d’entendre les oiseaux. Les bruits sur le chemin de la Côte-Vertu où se trouve la résidence près de l’aéroport sont très forts. On trouvera ça plus dur à vivre que dans le silence de Nominingue. »
Que laissent derrière elles les dernières représentantes de cette grande communauté? À cette question succède un long silence. Laurette Desjardins s’avance, émue, pour répondre. « Ce qui me vient, c’est que j’y laisse une partie de mon cœur. J’ai apporté quelque chose, mais j’ai aussi beaucoup reçu de chaque personne. C’est le respect de notre passage que je retiens. Et pas seulement des gens de Nominingue. »
Reine Perreault renchérit. « J’ai toujours salué les gens sur la rue et c’était réciproque. Ce que je laisse, ce n’est pas facile d’y répondre, car à mon arrivée à l’Accueil du Petit lac Nominingue, je ne sortais pas beaucoup. J’accueillais les gens de l’extérieur venu en retraite ou pour d’autres activités. Enfin, pour moi, chaque personne de Nominingue est importante. Je crois que d’avoir souri et salué chacune d’entre elles m’a rendue heureuse. C’est ça et tellement d’autres choses, petites comme ça. Aussi, faire reconnaitre aux gens qu’ils ont de la valeur, c’est important. »
Chose certaine pour Laurette et Reine, déménager à Ville St-Laurent demeure de l’inconnu. Et bien que le départ soit inévitable, elles ne cachent pas qu’elles reviendront quand la santé le permettra respirer le bon air de Nominingue.
Ce n’est qu’un « au revoir »?
L’éducation avant tout
La mission première des Sœurs de Sainte-Croix a toujours été l’éducation. Elles n’ont pas failli à leur tâche en plus de 120 ans. Comment Laurette Desjardins et Reine Perreault ont-elles vécu leurs années dans le milieu scolaire de la région?
Laurette Desjardins, plus âgée, est la première à répondre. « J’ai été à l’Institut familial de Nominingue de 1963 à 1965, puis j’ai été un an à l’Accueil du Petit lac de 1977 à 1978. Mais entre temps, j’ai longtemps été à L’Annonciation. Je suis revenue à Nominingue en 1996, à l’Accueil, puis nous sommes maintenant dans cette maison depuis des années. »
Certains se souviennent de Laurette Desjardins comme conseillère en orientation à l’école Sainte-Croix [aujourd’hui Le Méandre]. À cela s’ajoutent 18 ans en prison afin de jouer, les dimanches, de la musique aux prisonniers. « J’étais très occupée », confie-t-elle.
De son côté, Reine Perreault a enseigné à près de trois générations, mais pas à Nominingue. « J’ai enseigné 35 ans, dont 32 à l’école élémentaire de la paroisse du lac Blue Sea au sud de Maniwaki. J’ai pris ma retraite en 2003, et cette année-là, on m’a demandé de venir à l’Accueil, car deux sœurs étaient décédées. On avait besoin de mon aide. J’ai donc quitté mon “pays bleu” », chante-t-elle, faisant référence au succès du chanteur Roger Whittaker.
Sylvain Généreux, cofondateur des Gardiens du patrimoine archéologique des Hautes-Laurentides, présent lors de la rencontre de L’info avec les sœurs, rappelle que l’école du lac Blue Sea porte désormais le nom de Reine-Perreault. La principale intéressée fut très émue lors de l’annonce de la nouvelle dénomination, confie-t-elle, au point d’avoir encore des frissons juste à y penser. « C’est un grand moment dans ma vie. Mais c’est malheureux quelque part, puisque j’ai pris la place d’un saint », dit-elle en souriant.
Laurette Desjardins et Reine Perreault sont tout de même bien au fait de l’apport de leur communauté à Nominingue. « Les Sœurs étaient aussi partout dans le Nord, sauf dans deux villages je crois, rappelle Reine. De tous les événements, heureux ou malheureux, nous étions là avec les gens des paroisses. Et ils sont tous reconnaissants encore aujourd’hui. Ça nous touche. Nous, on connait tout le monde, on est avec eux: on rie et l’on prie avec eux. » Laurette acquiesce de la tête.
À un certain moment de la conversation, les deux sœurs avouent qu’elles quittent la région en étant heureuses de voir les Gardiens du patrimoine archéologique des Hautes-Laurentides être toujours là à poursuivre leur mission. Après tout, c’est un peu l’Accueil du Petit lac qui fut le berceau de l’organisme et Laurette, comme Reine, ont donné un sérieux coup de pouce à Sylvie Constantin et Sylvain Généreux. Bref, elles sont des gardiennes du patrimoine. Surtout que Laurette est une archiviste du passé de Nominingue. Elle a d’ailleurs légué beaucoup d’items à l’organisme.
Soulignons que le maire Georges Décarie et les conseillers municipaux ont rendu visite aux sœurs afin de les saluer et souligner leur importance à Nominingue. L’élu avoue qu’il aurait bien aimé « faire de quoi de plus gros, mais la COVID empêche de le faire. »
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Accueillies à coups de fusil!
La présence des Sœurs de Sainte-Croix reste intimement liée à l’histoire de Nominingue. Aujourd’hui les deux dernières d’entre elles quittent la communauté, 134 ans après l’arrivée des deux premières. Voici un extrait du livre Un glorieux passé: 50 ans à Nominingue qui relate l’arrivée de la supérieure Marie-de-Saint-Jean-de-la-Croix et sœur Marie-de-Sainte-Ursule: « Enfin, vers six heures du soir, après un trajet mouvementé de trois longs jours, les deux fondatrices atteignent Nominingue, terme de leur voyage, théâtre de leur futur apostolat. C’était le 30 septembre 1887. À l’arrivée des religieuses, quelques colons, de concert avec les Pères [Jésuites], tirèrent plusieurs coups de fusil en signe de réjouissance. » Hébergées chez une famille, elles ne prendront possession du couvent que sept semaines plus tard. Le 5 octobre, les 12 premiers élèves prennent place dans une partie de la maison qui sert temporairement d’école.
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